MENOPAUSE - « Ma » ménopause
- elleadebeauxrestes
- 10 juil. 2023
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 6 juin 2024
À 54 ans, à ma première bouffée de chaleur, je me suis dit et sans doute vous l'êtes vous dit aussi : tu en as vu d'autres, tu te connais, tu es courageuse, tu es positive, tu vas savoir négocier le temps qui passe, tu vas savoir négocier la ménopause ... et puis, à un moment donné, tout capote, tout bascule, tu sens que tu te noies, il y a rupture, il y a un "avant" et un "après" ! La bouffée de chaleur, tu comprends, mais s'ajoutent des crispations, des tiraillements, des engourdissements, des fourmillements, des brouillards, des sensations, des émotions inédits, pas identifiables. Tu ne te reconnais plus, tu te retrouves totalement perdue, sans ressources. Ce sont les hormones t'explique-t-on ! C'est donc "normal" mais tu t'inquiètes... Les hormones vraiment ? Tes règles se terminent et tout se dérègle ! C'est pourtant clair, verbalisé ainsi. Mais qu'est-ce que tu t'imaginais ma grande ? Si tout se dérègle, TOUT se dérègle !
Mais pourtant quand j'en discute avec mon amie d'enfance, elle me dit qu'elle va bien, elle est ménopausée depuis 5 ans, un vieux souvenir, elle vit sa meilleure vie, elle a une libido d'enfer, de l'énergie à revendre, elle dort bien, quelques kilos en plus mais toujours si jolie, plus épanouie et rayonnante que jamais, crinière au vent d'un gris lumineux. Elle sait miraculeusement prendre du recul par rapport aux tracas de son quotidien même bien plus tourmenté que le mien de vieille ménopausée affolée. Je me sens même un peu gourde, presque infantile, quand elle me regarde. Elle est sincèrement désolée quand je lui explique mes bouffées de chaleur, mes insomnies, ma nuque comme prise dans un étau, ma tension nerveuse qui fait du yo-yo, ma vessie qui me joue des tours, ma constipation, mes vertiges, mes bourdonnement d'oreilles, mes palpitations, mon désir en berne, la sécheresse vaginale... et avec, en prime, cette anxiété sournoise qui m'étreint sans vergogne, me fait sursauter au moindre bruit, m'empêche de sortir (phobie sociale, re-bonjour ! ). ... et en plus je dois chercher mes mots ! Je me demande si je n'ai pas une tumeur au cerveau, est-ce que l'AVC me guette ? Est-ce que j'ai trop de cholestérol, il faut que j'arrête le chocolat... culpabilité... j'ai acheté une nouvelle margarine qui va m'aider à le combattre, je fais attention à ce que je mange, je veux tout croire, je suis capable d'acheter toutes les solutions miracles ! Elle ne me donne aucune envie de continuer cette vie d'"après", motivation niveau zéro, je me traîne... il y a aussi cet "ami" qui me veut du bien, qui diabolise tout médicament, qui t'envoie la liste de tous les risques que tu prendras si tu touches aux hormones ou aux anti-dépresseurs... en ajoutant : "tu sais tes enfants ont encore besoin de leur maman !" J'ai eu envie de l'étrangler.
Oh la la ! "Ma pauvre" me dit mon amie.... je ne sais que te dire ... c'est un cap à passer, cela ne va pas durer, quoi que ma voisine de 80 ans a toujours des symptômes, elle se réveille le visage et les cheveux trempés chaque matin.
A chacune SA ménopause, à chacune de trouver son salut, sa manière de l'appréhender, de relativiser. Et voilà que je culpabilise, je ne sais pas faire, pire encore, par mon mental trop fort ou trop faible, je l'aggrave... je vais sur Instagram me faire agresser par des coachs qui me parlent de "second printemps". Je me dis mais comment peut-on dire ça ! Ainsi tout s'arrête, on est d'accord là-dessus, mais tout recommence, c'est une blague ! Moi, je ne vois que des deuils à faire, un équilibre acquis à la force de sa volonté et son courage dont tu as perdu la recette, un avenir qui débute chaque matin dans les tourments, le moment présent dont tu veux échapper, un miroir qui crie la vérité à pleins poumons... Malheureusement c'est bien le début de l'automne. Mais l'automne, cela peut être beau avec d'autres critères d'appréciation... il faut changer de "grille d'évaluation". J'essaie de m'encourager en utilisant le terme "transition" pour parler de la ménopause, il a le mérite de nous faire espérer qu'elle a un début et une fin. Entre les saisons il y a effectivement des périodes de transition. Il y a des étés indiens et des fins d'étés tout pourris qui ne nous laissent même pas le temps d'aller chercher une petite laine... Il y a des fleurs coupées qui tiennent un peu plus longtemps dans leur vase, naturellement ou artificiellement ... Puis nous finissons toutes par devenir des fleurs séchées, à nous de ne pas choisir le chemin de la fleur défraîchie !
C'est aussi très joli une fleur séchée me dit mon mari, c'est autre chose, c'est différent. Elle a d'autres formes de beauté, d'autres besoins, d'autres désirs, d'autres talents, d'autres failles, d'autres fragilités. Elle restera toujours unique comme la fleur fraîche qu'elle a été. Elle peut durer. Pour survivre à la ménopause et à nouveau vivre, il s'agit de refaire connaissance avec cette nouvelle "moi". Bon il y a du boulot pour certaines d'entre nous et quelques soins à apporter à cette fleur, histoire de lui donner les meilleures conditions pour bien s'assécher, ni trop rapidement, ni trop lentement, sans noircir, sans s'effriter, sans se faire oublier entre les pages d'un vieux bouquin suranné... Derrière le brouillard se dessine un chemin inconnu et non plus un mur infranchissable... le chemin sera plus joyeux à parcourir si on n'est pas seule... dans le partage.
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